Ce dictionnaire est un florilège, il recueille mots et expressions du français parlé hors de l'Hexagone. On s'y promènera aussi bien en Belgique, en Suisse, au Canada, aux Antilles que dans les pays d'Afrique ou de l'océan Indien. Nous nous sommes attaché à recueillir, dans ces pays, les mots courants, comme traversier (ferry-boat, Canada), guindaille (fête joyeuse, Belgique), cuissettes (culotte courte, Suisse). Voire sapeur (Afrique de l'Ouest) : personne tirée à quatre épingles, qui de ce fait appartient à la SAPE (Société des ambianceurs et des personnes élégantes). On notera çà et là des mots utiles, parce qu'ils couvrent un manque. Ainsi de primature (fonction et services du Premier ministre). D'autres mots donnent soudain corps à certains faits de la vie quotidienne. Comme aplatventrisme (fait de se mettre à plat ventre devant ses supérieurs) ; ou situationniste, personne habile à profiter de toute situation. L'ouvrage intègre aussi des mots essentiels, qui expriment fortement certaines réalités. Ainsi de l'arbre à palabres ou de l'alphabétiseur, éléments essentiels des cultures africaines. On verra cependant que l'un des choix qui ont guidé la constitution de ce recueil est celui du charme, de la surprise et de l'humour. Ainsi de la marna Benz, riche marchande circulant généralement en Mercedes (Afrique de l'Ouest). Ou du démarreur sexuel, qui aide à la performance amoureuse. Chacun y va de son esprit, de son génie, de ses marottes. On remarquera, pour la Belgique, l'abondance des mots de l'école. Pour le Canada, la richesse des mots de la conversation (les francophones de là-bas sont peu taciturnes et souvent ±verbomoteurs»). Pour la Suisse, les mots de la propreté. Et, pour l'Afrique, la truculence des mots de la fête et de l'amour. Ah ! le vibreur (fêtard) qui attend avec impatience les slows et leurs jeux de lumières ! On observera ici et là les grandes tendances de la langue parlée hors de l'Hexagone. Ainsi de l'inventivité des Canadiens, surtout des Québécois, pour rendre en français les mots et expressions de l'anglais. Ou, en Afrique, de l'exubérance à créer des verbes en -er sur des noms : amourer, cadeauter, antivoler, couteauner, voire torcher (éclairer de sa lampe torche). Ces richesses de la langue française parlée hors de France participent de l'histoire de la langue. Héritage vivant, la vieille langue classique se retrouve dispersée de par le monde. Mais la nouvelle langue se construit aussi hors de France. Sans doute serions-nous avisés d'y puiser largement, il est méconnu que certains termes aujourd'hui usuels ont pris naissance ailleurs, tel voyagiste. Ce terme, créé en 1979 au Québec, en remplacement de tour operator, fut officialisé en France en 1982. Le présent ouvrage puise dans le trésor de ce que nous appelions, en 1988, ±francopnonismes» (Les Mots de la francophonie, Belin, 1988). Francopnonismes, à savoir mots ou expressions du français parlé hors de France. Les inventaires se sont, depuis, multipliés, offrant une vue d'ensemble des richesses du français hors de l'Hexagone. Nos remerciements vont tout particulièrement aux chercheurs qui ont contribué à ces travaux.